Les chroniques économiques de Bernard Girard

27.10.12

Enfin de la lumière au bout du tunnel?




Explosion du chômage, pessimisme des chefs d’entreprise, chiffres de la croissance en berne, décrochage industriel dont témoignent le recul de nos exportations, dégradation de la note de la BNP-Paribas du fait de la situation économique de la France. Les raisons de désespérer sont multiples et solides. On les connaît bien et je n’y reviendrai pas préférant, ce matin, mettre l’accent sur des phénomènes dont on parle moins et qui témoignent tout à la fois de la résilience du tissu économique français qui semble d’être engagé dans une profonde transformation et d’une possible amélioration de la situation économique.

Comme toute transformation celle-ci est douloureuse et passe par la disparition de toute une série d’activités et d’entreprises qui ne sont plus compétitives, qui ne savent pas résister à la dureté des temps ou à la concurrence. Mais à coté de ces disparitions, il y a les germes du renouveau. Le cas de l’automobile est frappant. On sait que cette industrie est capitale pour  notre économie, elle représente, tous secteurs confondus, constructeurs, distributeurs, équipementiers, à peu 10% de l’emploi en France. On connaît les difficultés de Peugeot, celles de Renault, difficultés liées pour beaucoup à l’effondrement des ventes qui n’est pas près de s’achever, mais à coté de cela, il y a les bons résultats des équipementiers, des sociétés qui fabriquent des composants, Faurencia, Plastic Omnium… qui profitent de l’explosion mondiale de ce marché. Il y a également l’émergence, difficile et lente, mais prometteuse, du véhicule électrique qui offre à de nouveaux acteurs la possibilité de s’implanter sur ce marché, je pense à Bolloré qui après avoir obtenu le marché des 3000 véhicules Autolib, propose de louer aux Parisiens ses voitures à raison de 330€ par mois auquel il faudrait ajouter 200€ pour l’assurance, la charge électrique et le parking gratuit. Je ne sais s’il réussira mais on voit là se dessiner de nouveaux modes de consommation significatifs de cette transformation profonde de notre société industrielle qui s’esquisse à l’occasion de cette crise. 

Transformation qui touchera un grand nombre de secteurs, d’entreprises qui tâtonnent aujourd’hui mais ont entrepris de s’adapter à un monde nouveau. Ce sont quelques uns de ces phénomènes souterrains, invisibles à qui a les yeux fixés sur les chiffres de la croissance et du chômage, phénomènes qui incitent à relativiser le pessimisme ambiant que je voudrais vous présenter ce matin.

Les entreprises ont choisi de s’adapter
Les entreprises confrontées à la crise, qu’elles en souffrent directement ou pas, ne sont évidemment pas restées inertes. Beaucoup ont bougé, ont choisi de changer, de s’adapter à un monde différent, plus difficile. Une enquête que l’INSEE vient tout récemment de publier permet de le mesurer. Elle indique qu’à peu près la moitié des entreprises de plus de dix salariés du secteur marchand ont innové de 2008 à 2010, c’est-à-dire en plein cœur de la crise. Ces innovations ont pris plusieurs formes : innovations de produits, innovations d’organisation. Davantage de sociétés, précise l’INSEE, ont innové entre 2008 et 2010 qu’au cours des trois années précédentes, ce qui veut dire que la crise a été un facteur incitatif.
Les entreprises ont choisi de s’adapter et pas seulement en réduisant leurs effectifs, mais aussi en modifiant leurs manières de faire. C’est signe que l’économie est résiliente, capable d’adaptation. Ce qui est une bonne nouvelle.

Ces entreprises sont d’autant plus résilientes que 35% de ces innovations concernent l’organisation et les processus de prise de décision, ce qui, en d’autres mots, doit leur permettre d’être plus réactive. Ce qui est une nécessité en période de crise.

A l’inverse de l’impression que peuvent donner les enquêtes sur l’optimisme des chefs d’entreprise, ces innovations sont le plus souvent offensives : il s’agit de gagner des parts de marché, de s’installer à l’étranger comme le souligne l’enquête de l’INSEE :
Les sociétés investissant dans l’innovation, quel qu’en soit le type, ont essentiellement pour objectif d’augmenter leurs parts de marché, ou d’améliorer leurs produits. (…) Parmi les sociétés engagées dans des innovations technologiques, 58 % en attendent d’augmenter leurs parts de marché ou de conquérir de nouveaux marchés ; 55 % souhaitent élargir la gamme de leurs produits et 48 % en améliorer la qualité.
La qualité est également un objectif fort des sociétés innovant en matière d’organisation : 54 % souhaitent améliorer la qualité de leurs produits et 47 % désirent réduire leurs délais de réponse aux clients. Quant aux sociétés innovant en marketing, 62 % espèrent ainsi augmenter ou maintenir leurs parts de marché. (INSEE).

Naturellement, tout cela ne va pas sans difficultés, notamment en matière d’investissements : 28% des entreprises qui innovent disent avoir rencontré des problèmes de financement. C’est à cela que devrait servir la banque publique d’investissement. Et c’est à cela qu’elle servira si elle n’est pas prise au piège des urgences politiques et ne se trouve pas dans l’obligation de sauver des canards boiteux.
Les entreprises ont recommencé d’embaucher… timidement

Autre indice plutôt rassurant : les derniers chiffres de l’Urssaf sur l’emploi. On sait que le chômage explose. Des usines ferment, des entreprises disparaissent, créant de grosses poches de chômage qui frappent l’opinion, mais celles qui ne s’en tirent pas trop mal, celles qui innovent ont, semble-t-il, repris timidement leurs embauches.
Le nombre de déclarations d'embauche de plus d'un mois de l’ensemble des secteurs hors intérim est globalement stable en septembre (+ 1,1 %) et enregistre une hausse de 5,0 % sur 3 mois. Ainsi, la tendance à la baisse observée depuis mi 2011 semble s’être interrompue à l’été et la baisse annuelle n’est plus que de 7,3 %  (-9,9% le mois précédent). (baromètre économique de l’Acoss, octobre 2012).

Tout cela est bien fragile mais fait penser que l’on a peut-être passé le cap le plus difficile. Beaucoup, dans les mois qui viennent, va dépendre des réactions des Français aux hausses d’impôts. Vont-ils réduire leur consommation ? la maintiendront-ils ? tout dépendra, mais on l’a déjà dit, de l’impact réel de ces hausses de la fiscalité sur les revenus de ceux qui consomment le plus : les classes moyennes. S’il est faible, voire inexistant, comme le dit le gouvernement, ce sursaut se confirmera. S’il est fort, comme l’affirme l’opposition, il en ira tout autrement encore que les ménages français qui épargnent beaucoup et sont peu endettés ont des marges importantes, bien plus que celles de nos voisins.

Des signes encourageants en Europe
Beaucoup va naturellement dépendre de nos voisins et clients. Vont-ils se sortir de la récession ? ou vont-ils nous entraîner avec eux dans la spirale descendante ?

La Grande-Bretagne vient de publier de bons chiffres qui indiquent qu’elle sort enfin de la récession. Est-ce que ce sera le cas de l’Espagne ? du Portugal ? de l’Italie ? rien, pour l’instant ne le suggère, mais les efforts que ces pays ont accompli, l’assainissement des comptes engagé dans la zone euro devraient permettre d’assouplir, dans les mois qui viennent, les objectifs budgétaires. C’est ce qu’a déjà fait l’Italie ces dernières semaines.

Rien de pareil en Espagne, pour l’instant, même si on devine, quand on regarde à la loupe, quelques améliorations : les dépôts dans les banques ont pour la première fois depuis six mois progressé dans les banques espagnoles. C’est une nouvelle encourageante : cela veut dire que les Espagnols ont de nouveau confiance dans leurs banques et, surtout, que celles-ci pourront demain, avec un peu de chance, baisser les taux d’intérêts sur les prêts qu’elles proposent aux entreprises locales leur donnant ainsi la possibilité d’emprunter pour se développer. Du coup on commence à entendre des financiers annoncer la fin du tunnel. Le Financial Times citait il y a quelques jours, la responsable d’un fonds d’investissement disant :
« Les marchés détestent l’incertitude et nous avons maintenant un modèle de ce à quoi pourra ressembler le monde demain. Nous sommes de retour dans le monde des certitudes. Nous avons passé le plus difficile (…) mais avec quelqu’un d’aussi puissant que Draghi nous avons fait beaucoup de chemin. » 

Les salaires résistent à la crise
La bonne tenue des rémunérations en France mérite également attention. A l’inverse de ce que l’on pouvait craindre et de ce qui s’est passé ailleurs, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Grèce, en Espagne, la crise et le chômage ne se sont pas traduits en France par une baisse des salaires.

On peut hésiter sur l’interprétation.

Ce peut être, comme le suggère Patrick Artus, l’économiste de Natexis qui a attiré l’attention sur ce phénomène dans une de ses récentes notes, le fait de nos institutions et de modes de rémunérations rigides qui interdisent les baisses de salaires dans les périodes difficiles.

On peut également y voir le signe de ce que beaucoup d’entreprises s’en sortent correctement et n’ont donc pas de motif de réduire leur masse salariale. S’il est vrai qu’il est difficile de réduire celle-ci de manière autoritaire, il est également vrai que la structure des rémunérations a, dans les entreprises privées, beaucoup évolué ces dernières années. La plupart comprennent aujourd’hui une part variable assise sur les performances de l’entreprise, son chiffre d’affaires… si celui-ci avait diminué, les salaires auraient mécaniquement suivi. Or, ce n’est apparemment pas ce qui s’est produit.

On peut encore une autre explication : si les entreprises n’ont pas fait plus d’efforts pour comprimer leur masse salariale c’est que du fait de leurs évolutions le poids de celle-ci dans leurs coûts a diminué. Et c’est sans doute ce qui s’est produit : du fait de la crise, des craintes pour l’avenir, les entreprises n’ont pas recruté quand elles pouvaient en avoir besoin, elles se sont séparées d’intérimaires. Elles ont demandé à leurs salariés de faire plus d’efforts, de travailler plus, d’être plus productifs. Il est difficile dans ce contexte de réduire les salaires. Tout au plus peut-on éviter de les augmenter. Et c’est probablement ce qui s’est passé.

Quel s’en soit le motif, cette bonne tenue des rémunérations est plutôt une bonne nouvelle pour qui s’inquiète de la consommation : rien ne serait pire pour celle-ci que des baisses de salaires.

La naissance d’un marché du travail européen
Un autre facteur qui pourrait à terme modifier profondément notre environnement économique est la création d’un marché du travail européen. Du fait de la crise, nous en approchons. On voit aujourd’hui des Portugais, des Espagnols, des Irlandais, des grecs, émigrer, aller s’installer ailleurs pour échapper au chômage chez eux. L’Europe, la France, l’Allemagne, les pays nordiques, sont leur première destination puisqu’ils ont librement accès au marché du travail.

On dira : c’est un peu surprenant. Comment l’arrivée d’immigrants, seraient-ils européens peut-elle contribuer à améliorer la situation alors que nous connaissons un chômage massif qui ne fait que croître ? la réponse est à chercher du coté du marché du travail et de ses imperfections. Alors même que le nombre de chômeurs augmente, le nombre d’emplois qui ne trouvent pas preneur reste important. Certains métiers sont en train de disparaître faute de personnel. C’est, dans le bâtiment, le cas des couvreurs. Mais on sait également combien de régions manquent de médecins, d’infirmières…
Or, ce sont autant d’imperfections qu’une plus grande mobilité des travailleurs au sein de l’Europe pourrait réduire. Le travailleur espagnol chassé de chez lui par la crise acceptera plus volontiers de devenir couvreur que d’autres. Le médecin grec ou portugais acceptera de s’installer dans des régions que délaissent leurs collègues français ou allemands.

Les obstacles à la mobilité en Europe restent importants, le premier est, bien sûr, la langue, mais la crise devrait accélérer la création de ce marché européen de l’emploi. Et plus le marché est vaste, plus les travailleurs sont mobiles plus il y a de chances que les postes orphelins trouvent preneur. Avec tout ce que cela suppose d’effet d’entraînement sur le reste de l’économie.

Des indices épars, fragiles, mais… 
Ce  sont des indices épars que j’ai réunis dans cette chronique pour suggérer que nous étions peut-être en train de voir le bout de tunnel, un peu de lumière tout au bout. Tout cela est bien sûr très fragile, peut à tout moment être démenti, mais cela repose, pour l’essentiel, sur des changements institutionnels qui ont consolidé la construction européenne, l’ont rendue tout à la fois plus solide et plus résiliente. Ce qui autorise d’excellents connaisseurs de ces dossiers à faire preuve d’un certain optimisme. Je pense à Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, qui déclarait il y a quelques jours dans un entretien donné au journal 20 minutes :

« Les conditions d'une sortie de crise sont réunies. Nous concentrons tous nos efforts pour extirper définitivement de la tête des investisseurs cette idée absurde d’éclatement de l’euro et tranquilliser le monde entier sur la pérennité de la zone euro. Dans ce contexte, nous pouvons espérer en 2013 qu'en France, nous voyions progressivement la confiance revenir et avec elle l'investissement. »

Il arrive aux banquiers centraux comme aux autres de se tromper. Espérons que cette fois-ci ce ne sera pas le cas.

23.10.12

Pourquoi nul ne se soucie des manifestations contre l’austérité ?


 Après les Grecs, les Portugais et les Espagnols, voilà que les Britanniques, dont ce n’est guère la tradition se mettent à manifester massivement contre l’austérité. Il ne se passe pas de semaine que dans l’une ou l’autre de ses capitales, l’Europe connaisse des manifestations massives, parfois violentes. On en a de temps à autre des échos dans la presse, la télévision montre des manifestants qui jettent des pierres, des policiers en tenue de contre-manifestants avec boucliers et casques qui chargent, souvent violemment mais aussi, comme je le voyais hier en Espagne, de manifestants qui relèvent l’identité de policiers qu’ils jugent trop agressifs. La rue est en Europe à feu et à sang et tout se passe comme si cela n’avait pas d’importance, les politiques n’en parlent à peu près jamais et on n’a pas le sentiment qu’à Bruxelles, Berlin ou Paris, là où se construit l’avenir de l’Europe on s’en préoccupe plus que cela.

Ce silence, cette indifférence sont pour le moins troublants et méritent que l’on essaie de les comprendre. 

Des dirigeants européens aveugles ? 
Tout se passe comme si les dirigeants européens ne voyaient rien. Ce n’est pas faute d’images, que ce soit en Allemagne, en France ou ailleurs, les chaines de télévision montrent bien des images de manifestants, les journaux en parlent, mais tout se passe comme s’ils n’avaient pas les lunettes leur permettant de voir ce qui est cependant sous leurs yeux.

On peut à cela avancer plusieurs explications.

On peut évoquer l’éloignement des responsables européens. Le maintien de l’ordre est subsidiarisé, c’est l’affaire des gouvernements grecs, espagnols… pas celui des gouvernements allemand, français ou britannique qui ne s’en préoccupent donc pas, qui s’en préoccupent d’autant moins que les institutions du maintien de l’ordre semblent continuer d’obéir aux pouvoirs en place. Ces manifestations sont d’autant moins leur affaire que ces manifestants ne trouvent pas ou peu de porte-parole au Parlement Européen, à la Commission ou dans le système politique des grands pays. Qui, pour ne prendre que cet exemple, défend en France les revendications des Grecs, des Espagnols ou des Britanniques ? Le Front de gauche et lui seul et encore de manière relativement discrète.

On peut également imaginer que les dirigeants minimisent l’importance de ces protestations, qu’ils les jugent inévitables mais sans véritable conséquence. Aussi importantes soient-elles, elles ne leur paraissent pas de nature à modifier profondément les politiques des gouvernements concernés. Elles seraient d’autant moins de nature à les modifier que ces gouvernements seraient, du fait de la situation, dans l’impossibilité d’en mener une autre.

Les dirigeants européens seraient, dans cette hypothèse, d’autant moins inquiets qu’ils ne croient pas que ces manifestations présentent de grands risques pour les institutions en place. Dit autrement, ils jugent qu’il y a peu de chance qu’elles débouchent sur un mouvement révolutionnaire.

Se trompent-ils ? c’est possible. Ce ne serait pas la première fois que les dirigeants en place seraient aveugles à une contestation profonde, ne la verraient pas monter et seraient pris par surprise. C’est la thèse que défendent ceux qui à l’extrême-gauche voient dans ces mouvements l’annonce d’un mouvement de transformation profonde de la société. Mais on peut douter de la perspicacité de l’extrême-gauche qui nous annonce régulièrement, chaque automne ou presque, la révolution et qui ne voit toujours rien venir.

L’histoire nous l’enseigne, pour que révolution il y ait, il faut conjonction de deux phénomènes : une alliance des classes populaires et des classes moyennes et l’émergence de tensions au sein même l’élite entre ceux qui sont inquiets et prêts à des réformes et ceux qui veulent que rien ne change. Or, il me semble que l’on n’observe aujourd’hui aucun de ceux facteurs n’est aujourd’hui.

Des classes populaires fragmentées, divisées 
On peut supposer qu’une alliance entre les classes populaires et les classes moyennes se dessine dans les pays les plus touchés par la crise, en Grèce ou en Espagne, deux pays dans lesquels l’austérité en vient à toucher au cœur de l’Etat providence. Lorsque le gouvernement espagnol décide de couper dans les dépenses d’éducation, il fait descendre dans la rue les classes moyennes. Même chose sans doute en Grèce. Mais on ne voit rien de pareil ailleurs, en France ou en Allemagne.

Dans ces pays, dans le Nord de l’Europe mais aussi en Italie, cette alliance est d’autant plus improbable dans l’immédiat que la classe populaire s’est dispersée, fragmentée, divisée et est devenue largement invisible.

 Les classes populaires d’hier se confondaient, pour l’essentiel, avec la classe ouvrière qui était concentrée dans les villes, organisée grâce notamment aux syndicats présents dans toutes les grandes usines. Ses intérêts étaient défendus, dans l’espace public, démocratique, par des politiques, les partis de gauche, et des intellectuels. On pense à Jean-Paul Sartre, Michel Foucault, aux grands intellectuels communistes qui du fait de leur présence dans les médias, de leur réputation dans les universités établissaient un pont entre les protestations ouvrières et les révoltes des étudiants, enfants pour la plupart des classes moyennes.

 Les classes populaires d’aujourd’hui sont toutes différentes. Elles ont éclaté. Leur unité, cette unité qui permettait de parler de classe ouvrière au sens marxiste, s’est défaite. Appartiennent aujourd’hui à la classe populaire aussi bien les enfants d’immigrés qui habitent dans les banlieues que les ouvriers qui se sont installés dans des zones semi-rurales. Or, quoi de commun entre les uns et les autres ? quelle solidarité ? Le populisme a fait son œuvre : un tel fossé s’est creusé entre les ouvriers installés dans la lointaine périphérie des grandes villes et les jeunes révoltés de nos banlieues tentés par un Islam plus ou moins radical que nul n’imagine qu’ils se rapprochent dans un combat commun.

Une classe populaire invisible
Ce fossé est d’autant plus large que les uns et les autres sont devenus invisibles. On peut chercher on ne trouve aucun intellectuel qui exprime, donne du sens et porte sur la place publique les inquiétudes des habitants des zones semi-rurales. Mais on n’en trouve pas plus qui feraient de même pour les jeunes révoltés des quartiers difficiles. Les uns et les autres sont de fait inaudibles, non parce que les médias les censureraient mais parce que personne ne prend la parole pour eux. Ils sont en somme exclus du débat démocratique, ce qui n’est pas sans conséquences sur leurs positions et leur manière de voir le monde.

Ils se sentent isolés, abandonnés, négligés, interdits de parole et se réfugient dans des positions extrêmes. Les premiers sont souvent tentés par le populisme, le Front National, les seconds par la religion dans ses formes les plus radicales, mais on le voit bien, ces deux tentations les opposent plus qu’elles ne les rapprochent. Le jeune révolté de banlieue qui cherche dans l’Islam une raison de vivre ne devine pas qu’il appartient au même monde que le raciste installé en lointaine banlieue. Tous deux souffrent des mêmes phénomènes, mais bien loin de se reconnaître, de se sentir solidaires, complices, ils s’opposent, se combattent et s’interdisent, les uns comme les autres d’obtenir la compréhension des classes moyennes. Quel prof de lycée ira, par exemple, soutenir les revendications des électeurs du Front National perdus dans des communes lointaines ? quel employé municipal trouvera des excuses aux jeunes gens qui mettent le feu à des voitures dans les quartiers difficiles ?

La révolte est bien là, mais cette fragmentation interdit la solidarité. Elle peut conduire à des jacqueries, à des mouvements de révolte qui suscitent l’opposition du reste de la population, mais pas à autre chose.

Des élites indifférentes 
Si l’alliance des classes moyennes et des classes populaires n’est pas d’actualité, la division des classes dirigeantes, des élites, ne l’est guère plus.

C’est une constante de tous les mouvements révolutionnaires de voir, à leurs débuts, une partie de la classe dirigeante prendre fait et cause pour les révoltés. Ce fut le cas en France, en 1789, on se souvient du rôle de Philippe d’Orléans dit Philippe l’Egalité qui vota la mort de Louis XVI. Ce le fut en Russie où une partie de l’aristocratie et de la bourgeoisie prit fait et cause pour le nouveau régime en 1917. On pourrait, de la même manière, rappeler que le New Deal de Roosevelt, qui fut une révolution à sa manière, a obtenu le soutien de plusieurs dirigeants de grandes entreprises. On ne voit rien de pareil aujourd’hui et pour deux raisons.

La première est l’effondrement de l’espérance communiste depuis bien avant la chute du mur de Berlin. Les élites françaises de la fin du 18ème siècle pouvaient craindre le modèle britannique, celles de la Russie du début du vingtième siècle le modèle occidental, celles des Etats-Unis des années trente pouvaient craindre l’exemple russe, nos élites ne voient pas se dessiner à l’horizon d’alternative au modèle capitaliste. Et ces craintes pouvaient les amener à rechercher des solutions pour éviter que ces modèles ne séduisent trop les classes populaires. Si tant de dirigeants américains des années trente ont été favorables au New Deal et à ses mesures sociales c’est qu’ils y voyaient un rampart contre la révolution. Rien de la sorte ne les incite aujourd’hui à rechercher des réformes favorables au plus grand nombre.

Ils en recherchent d’autant moins que la mondialisation est passée par là qui a modifié profondément les comportements des dirigeants et leur manière de voir le monde. Hier, les plus éclairés pouvaient s’inquiéter de la dégradation du système scolaire qui menaçait la qualité des personnels qu’ils pourraient recruter dans le futur. Aujourd’hui qu’ils peuvent recruter dans le monde entier des collaborateurs, la question ne se pose plus de la même manière. La France ou l’Allemagne ne produisent plus d’ingénieurs ? Peu importe, ils savent pouvoir en trouver ailleurs dans le monde, en Inde, en Chine ou en Russie. Et ce qui vaut pour l’éducation vaut peu ou prou pour tous les autres systèmes sociaux.

L’indifférence des élites aux souffrances des peuples se nourrit de leur absence d’inquiétude quant à l’avenir. Celui de leurs entreprises : le capitalisme mondialisé n’a pas de concurrent, pas d’adversaire. Pourquoi donc se faire du souci, mais aussi le leur et celui de leurs proches puisqu’ils peuvent assez facilement se mettre à l’abri des conséquences de mouvements sociaux trop radicaux.

Une inquiétante indifférence 
On le voit, plusieurs raisons peuvent expliquer cette indifférence des dirigeants à ces protestations populaires. Je résume les deux qui me paraissent les plus pertinentes : l’éclatement de la classe populaire en groupes antagonistes, l’indifférences des élites économiques aux conséquences de la dégradation des conditions de vie de ces mêmes classes populaires.

Si tel est bien le cas, la révolution est peu probable, mais on peut craindre le contraire : une contre-révolution construite sur l’alliance de ces classes populaires abandonnées, qui votent à l’extrême-droite, et d’une partie des élites économiques. Ce ne serait pas la première fois.

 La droitisation de la droite que l’on trouve de plus en plus sur les positions de l’extrême-droite dans de nombreux pays, notamment en France, peut le faire craindre. Les premières victimes en seraient les classes moyennes qui ont su tirer parti de l’Etat providence et ces industriels qui vivent aujourd’hui dans un monde ouvert mais qui ne l’est pas forcément pour toujours.

Cette alliance de la droite et de l’extrême droite se fait aujourd’hui sur le dos des immigrés et de leurs enfants, mais il suffit de lire le programme du Front National et des partis d’extrême-droite ailleurs en Europe pour comprendre qu’elle se fera aussi sur le dos des échanges internationaux. Le protectionnisme est au cœur de cette nouvelle pensée réactionnaire. Il est ce qui la rend populaire : l’ouvrier qui perd son emploi parce que les Chinois fabriquent aussi bien pour moins cher ne peut être que tenté par une fermeture des frontières qui permettrait, pense-t-il, de protéger son emploi, tout comme le patron d’une entreprise pas encore mondialisée qui peut craindre la concurrence d’industriels venus d’ailleurs.

 Illusion ? sans doute, mais qui structure notre espace politique et économique de manière nouvelle et plutôt angoissante. Si nous ne voulons pas demain devoir nous battre contre des formes plus ou moins nouvelles de fascisme, mieux vaudrait aujourd’hui convaincre nos élites d’entendre les protestations des classes populaires.

16.10.12

Ayrault a-t-il choisi la bonne stratégie pour réduire le déficit?




Le gouvernement a donc choisi d’exercer une forte pression fiscale sur les Français pour sortir du déficit budgétaire. Les premières réactions ont surtout porté sur l’impact de ces mesures sur les uns et les autres. les observateurs sont à peu près tous tombés d’accord sur deux points : beaucoup plus de contribuables que ne le dit le gouvernement seront touchés par ces mesures, celles-ci affecteront en priorité les plus riches.

En ce sens, on peut dire que le gouvernement a loupé sa communication en faisant croire que 90% des Français échapperaient à toute augmentation de l’impôt mais qu’il a bien tenu ses promesses d’équité. Il a d’autant plus raté sa communication qu’il a annoncé quelques jours plus tard son intention de financer les baisses de cotisations sociales des entreprises par la CSG, ce qui signifie une augmentation des impôts pour tous. Depuis, on le sait, il a reculé, s’est emmélé les pieds dans ses projets, mais peu importe. La seule chose certaine est qu’il y aura des augmentations d’impôts d’autant plus élevées que l’on est plus riche.

Reste à savoir si ces nouvelles mesures seront efficaces. Vont-elles effectivement le réduire le déficit. Ce sera le cas si elles améliorent massivement les recettes fiscales ? mais les amélioreront-elles autant que le souhaiterait le gouvernement ? Ce n’est pas certain.

Plusieurs facteurs pourraient contrecarrer ses projets : la récession qui réduirait les recettes des entreprises et celles des ménages, la fraude, l’évasion fiscale et le changement des comportements des agents économiques, de ceux, du moins, qui risquent d’être le plus touchés par ces nouvelles mesures.

La récession, le mauvais exemple de 2009
Une mauvaise situation économique pourrait gêner considérablement le gouvernement. Le mécanisme est simple et bien connu : les recettes diminuent, du fait de la crise, tandis que les dépenses, notamment les dépenses sociales, les allocations chômage, augmentent. C’est ce qui s’est produit en 2009 : cette année là, la croissance économique avait été négative, elle avait reculé d’un peu plus de 2%, ce qui s’était traduit, mécaniquement, par une augmentation du déficit. Les recettes de l’Impôt sur les Sociétés ont, cette année là, baissé de 6% et celles tirées de l’impôt sur le revenu de 23%. Droits de douane et TVA avaient également subi une érosion significative.

Cela peut-il se reproduire ? sans doute. Et c’est d’autant plus prévisible que le contexte général est mauvais, plusieurs de nos voisins sont entrés en récession et vont donc réduire, si ce n’est déjà commencé, leurs achats de nos services et produits. Cette perte de recettes peut-elle être aussi importante qu’en 2009 ? il faudrait, pour cela, que la croissance recule bien plus qu’il n’est aujourd’hui indiqué dans les prévisions les plus négatives. Peut-elle cependant réduire à néant la polituque du gouvernement ? 

Si l’on regarde ses recettes fiscales, elles se partagent en quatre grandes sources : la TVA qui représente 51% de ses recettes, l’impôt sur le revenu, un peu plus 20%, l’impôt sur les sociétés, un peu plus de 17%, la Taxe sur les produits pétroliers, un peu plus de 5%, le reste se partageant entre différentes taxes.
Ces chiffres l’indiquent : s’il veut conserver ses recettes fiscales, l’Etat a tout intérêt à soutenir la consommation qui risque de souffrir de l’augmentation de l’impôt sur le revenu s’il apparaît qu’elle touche effectivement beaucoup de monde, et de la montée du chômage. D’où, au delà des polémiques politiques, l’intérêt des débats sur l’impact des mesures annoncées sur les ménages. Si elles ne touchent vraiment, comme l’affirme le gouvernement, que les plus riches, l’impact sur la consommation sera réduit. Dans le cas contraire, ce sera beaucoup plus difficile.

Vues les augmentations prévues, les recettes tirées de l’impôt sur le revenu devraient progresser. Toute la question est de savoir si elles progresseront suffisamment pour compenser les pertes prévisibles de recettes sur l’impôt sur les sociétés dont les bénéfices vont très probablement rétrécir du fait du recul de la croissance.

La fraude
Venons-en maintenant au deuxième point : la fraude. L’augmentation des impôts entraîne presque automatiquement son augmentation lorsque celle-ci est possible. On sait qu’elle ne l’est pas pour tous. Un commerçant ou un artisan peuvent plus facilement masquer une partie de leurs revenus qu’un salarié.

Cette fraude est importante. En 2010, Valérie Pécresse avait indiqué que le fisc et les douanes avaient récupéré  16 milliards d’€ grâce à leurs différents contrôles. Le syndicat Unifié des Impôts estimait, lui, en 2008, que le montant de la fraude fiscale était de l’ordre de 40 milliards. Il s’agit, à l’évidence, de sommes gigantesques et si le gouvernement veut réussir son pari, il lui faudrait éviter qu’elles augmentent.

Jérôme Cahuzac, le ministre du budget, vient d’annoncer qu’il présenterait en décembre prochain de nouvelles mesures pour lutter contre. Fort bien, mais on sait aussi que la fraude dépend de la manière dont l’impôt est conçu. L’impôt sur la fortune en offre un bel exemple : il taxe également les biens immobiliers et les actions. Or, il est bien plus facile de tricher sur la valeur d’un bien immobilier qui ne peut au mieux faire l’objet que d’estimations susceptibles de varier que sur la valeur d’actions qui sont publiées au jour le jour. En ce sens, les propositions d’intégrer dans l’impôt sur la fortune les œuvres d’art, si elle a une portée symbolique, risque de ne guère rapporter : comment savoir si tel ou tel contribuable possède des œuvres d’art ? et comment évaluer celles-ci alors que leur prix peut fortement varier selon leurs conditions de mise en vente comme l’illustrent tous les jours les résultats de Drouot et des autres salles de vente.

L’évasion fiscale
On associe parfois l’évasion fiscale à la fraude. Ce sont deux choses différentes. Les français ont le droit d’aller s’installer à l’étranger. Ils n’ont pas celui de frauder.

L’évasion fiscale, l’installation de contribuables à l’étranger, en Suisse, en Belgique, en Grande-Bretagne pour échapper à l’impôt fait régulièrement l’objet des titres de la presse. La présidente du Medef a annoncé qu’elle exploserait, quelques cas d’artistes, de sportifs ou d’industriels font de temps à autre scandale. Le phénomène est cependant mal connu. Malgré toutes les déclarations alarmistes il ne semble pas qu’il ait beaucoup progressé ces derniers mois, mais peut-être est-il un peu tôt pour le dire.
Il est vrai que l’évasion fiscale est plus simple aujourd’hui, dans une Europe ouverte, qu’hier, dans des pays fermés. Il est vrai également qu’elle ne concerne plus seulement des particuliers fortunés, mais qu’elle peut être organisée par de grandes entreprises. Il leur suffit, au terme d’une réorganisation, d’installer à l’étranger, en Belgique, par exemple, leur siège social ou telle ou telle de leur activité pour que ceux de leurs dirigeants qui perçoivent des salaires très élevés deviennent résidents d’un pays à la fiscalité plus clémente. Mais, il y a des limites à l’exercice : il n’est pas évident de diriger une entreprise depuis l’étranger, sachant qu’un français ne peut être résident fiscal à l’étranger que s’il y vit de longues périodes. Gabriel Zucman, qui a réalisé une étude sur le phénomène entre 1995 et 2007, parle d’un flux des départs assez faible, de l’ordre de 500 par an. Cet économiste de l’école de Paris évalue le manque à gagner du fisc français du fait de cette évasion fiscale à, à peu près 5 milliards d’euros, soit l’équivalent du budget du ministère de la justice.

Les montants de la fraude et de l’évasion fiscale sont, on le voit, significatifs. Si l’on savait comment les combattre et les supprimer on pourrait faire l’économie des augmentations d’impôts. Les montants sont comparables : l’effort fiscal demandé aux Français est de 30 milliards. La fraude est évaluée à 40 milliards et l’évasion à 5 milliards. Mais on ne sait pas. Et le risque est de les voir augmenter même s’il est probable que ce ne sera que de peu. 

Trop d’impôts peut-il tuer l’impôt ?
Reste un dernier point : trop d’impôts pourrait tuer l’impôt. C’est une thèse que les économistes soutiennent régulièrement. Leur raisonnement est le suivant : les agents économiques soumis à une trop forte pression fiscale réduisent leurs efforts. A quoi bon travailler plus si c’est pour ne pas gagner plus. C’est la fameuse thèse de Laffer que l’on voit aujourd’hui réapparaître dans quelques éditoriaux.
Le raisonnement est populaire. Il a nourri et continue de nourrir les argumentaires de tous ceux qui militent pour des baisses d’impôts. On sait cependant qu’il ne fonctionne pas : ce n’est pas par ce que l’on baisse les impôts que les agents économiques travaillant plus, gagnent plus et finissent par en payer plus. Et a contrario, on n’a jamais vraiment prouvé que les augmentations d’impôts réduisaient la propension à travailler. On imagine mal un directeur d’entreprise, un commerçant ou un médecin prendre quelques jours de vacances de plus parce qu’il paie trop d’impôts pour payer moins d’impôts même s’il n’est pas rare de les entendre proférer ce type de menace.

Le plus probable est que ces augmentations d’impôts des plus riches conduiront les entreprises à rechercher d’autres modes de rémunération. Et elles auront là l’embarras du choix : plutôt que de verser des salaires mirifiques, elles pourront loger leurs cadres dirigeants, mettre à leur disposition une voiture avec chauffeur, une carte de crédit avec la capacité de dépenser autant qu’ils souhaitent. Il est même probable que ces hausses d’impôt favoriseront le développement de l’individualisation des hautes rémunérations et la mise en place de cocktails de rémunérations qui donnent à chacun la possibilité de construire sa rémunération en fonction de ses contraintes. Le chef d’une famille nombreuses a d’autres besoins que le célibataire : il est moins imposé et peut donc préférer du salaire à des avantages en nature…

On le voit donc, plusieurs facteurs peuvent raboter une partie des recettes fiscales qu’attend le gouvernement. Au risque de ne pas réduire autant que prévu le déficit. Est-ce grave ? Pas forcément si cela lui permet tout de même de réduire de manière significative le déficit.

Il est plus facile de collecter des impôts que de réduire les dépenses
Le gouvernement s’est donné des objectifs ambitieux. Il veut ramener le déficit public à 3% en 2013, contre 4,5% pour cette année. Y arrivera-t-il ? pour tous les motifs que j’ai donnés, recul de la croissance, augmentation des dépenses sociales, de la fraude et de l’évasion fiscale, modification du comportement des entreprises, ce n’est pas le plus probable. Ce qui amène à se poser deux questions : est-ce que cet objectif de 3% est raisonnable ? est-ce que l’on aurait pu l’atteindre autrement ?
Pour atteindre son objectif, le gouvernement a choisi un mix qui associe augmentation des impôts de l’ordre de 30 milliards, et réduction des dépenses publiques de l’ordre de 10 milliards. Il aurait pu faire, comme le proposait la droite, le contraire, faible augmentation des impôts, forte baisse des dépenses. C’est le chemin qu’a suivi dans les années 90 le Canada. Aurait-ce été une meilleure piste ? ce n’est pas certain. Et pour un motif tout simple : il est plus facile de collecter des impôts que d’agir sur les dépenses.

Chaque fois que l’on veut toucher aux dépenses de manière autoritaire, on se heurte à deux difficultés : les protestations de ceux qui sont touchés et la difficulté de maintenir un service de qualité.
Le cas des retraites de la RATP et de la SNCF a montré le poids des groupes de pression. Le gouvernement Fillon a annoncé haut et fort qu’il avait réussi à régler le problème. En fait, il n’a touché en rien aux retraites des salariés de ces entreprises aujourd’hui en activité. Seuls ceux entrés dans ces entreprises depuis la réforme verront dans quelques décennies leurs pensions diminuer.

Quant aux mesures prises pour réduire les effectifs de l’administration on sait qu’elles ont beaucoup désorganisé sans vraiment réaliser d’économies. Ce qui explique d’ailleurs que les déficits aient continué de se creuser alors que des mesures étaient prises pour réduire les dépenses. En ce sens, le choix d’un mix qui met l’accent sur les impôts sera plus efficace même s’il ne permettra sans doute pas d’atteindre cet objectif de 3% annoncé.

Ne pas atteindre cet objectif de 3%, est-ce si grave ?
Faut-il d’ores et déjà parler d’échec ? pas forcément. L’important est la volonté manifestée par le gouvernement de réduire le déficit, volonté confirmée par des mesures difficiles, douloureuses qui permettront de réduire le déficit même si ce n’est pas d’autant que prévu. Les créanciers, les marchés financiers, ceux qui nous prêtent de l’argent seront d’autant plus indulgents qu’ils savent le coût politique des mesures prises. Et le fait que le taux de 3% risque de ne pas être atteint ne les gênera probablement pas beaucoup. Pour deux motifs : d’abord parce que c’est la tendance qui compte à leurs yeux, et la tendance va dans le bon sens, et, ensuite, parce qu’ils sont sans doute moins obnibulés par ces 3% que les gouvernements.

Les marchés se préoccupent surtout de la capacité des Etats à rembourser les prêts qu’ils leur font. Et ce qui les intéresse est donc de savoir si les dépenses qu’un Etat va réaliser grâce à son endettement lui promettent de recettes fiscales suffisantes pour assurer le service de la dette.

Ils n’ont ni les moyens ni le temps d’entrer dans les détails, ils se contentent de quelques mesures simples. Le déficit d’un Etat doit correspondre à peu près à son niveau historique de croissance corrigé de l’inflation. Le taux de 3% correspond à peu près à cela, et c’est bien pourquoi c’est ce que visent tous les pays développés, l’Europe mais aussi les Etats-Unis. Mais on voit bien qu’il n’est pas figé : un pays qui aurait une croissance de 2% l’an et une inflation du même niveau pourrait sans doute supporter un déficit légèrement supérieur sans difficultés. Les marchés ne commenceraient à s’inquiéter que si ce déficit dérapait. Et c’est parce qu’il a passé ce seuil où il cesse d’être soutenable dans de nombreux pays européens qu’ils les ont sanctionnés.

Le gouvernement Ayrault a donc choisi une stratégie qui paraît plus efficace que d’autres pour rééquilibrer les comptes. Reste à mener la bataille avec adresse parce que les risques de récession et donc de baisses des recettes fiscales ne sont pas minces. Reste aussi à s’assurer qu’il saura bien réduire les dépenses et toucher là où celles-ci se développent. Il lui faudra d’autant plus d’habileté qu’il souhaite réduire massivement les cotisations sociales des entreprises et que cela suppose un transfert vers les ménages, vers, notamment, la CSG. Or, ce transfert étant important, de l’ordre de 40 milliards, il ne pourra se faire que si le gouvernement, une fois donnés des gages aux marchés financiers, s’engage également dans une baisse des dépenses. Ce qu’il devra faire autrement que les gouvernements Sarkozy qui ont tout misé sur la réduction des effectifs de l’administration centrale avec des résultast mitigés. Il lui faudra tailler dans le mille-feuille administratif, dans les effets pervers d’une décentralisation qui bien loin de réduire les coûts de l’Etat les a fait exploser en multipliant les couches : communes, intercommunalités, départements, régions… 

S’il veut effectivement pérenniser la discipline budgétaire, le gouvernement Ayrault devra s’attaquer à ce chantier qui ne sera pas le plus facile tant il risque de se heurter aux oppositions des élus de tous bords. Son incapacité à faire appliquer la règle du non cumul aux élus socialistes n’est qu’un avant-goût des oppositions qu’il risque de rencontrer.






9.10.12

Rigueur en Europe : les bonnes raisons des Allemands




En ces périodes d’austérité budgétaire, de récession en Grande-Bretagne ou en Espagne, de révoltes populaires en Grèce et ailleurs, il est de bon ton de s’en prendre à l’Allemagne, la première économie de la zone euro et le seul pays qui tire à peu près son épingle du jeu du fait de sa spécialisation industrielle.

C’est la sévérité des Allemands, l’inflexibilité d’Angela Merkel, son refus de toute concession qui seraient à l’origine de l’effondrement de l’économie en Grèce, en Espagne, au Portugal, ou des programmes de rigueur accentuée que François Hollande met actuellement en place en France. Le refus allemand de toute inflation, l’obstination de Berlin à imposer à tous des programmes de désendettement seraient la source de bien de nos difficultés, à en croire de nombreux observateurs qui ne manquent pas une occasion de faire référence à l’histoire, à la grande inflation des années vingt, à la montée du nazisme en plein cœur d’une crise de 1929 aggravée par les politiques récessives menées à l’époque par les gouvernements conservateurs.

On entend si souvent ce type de discours, que j’ai eu envie ce matin non pas de prendre le contre-pied mais d’essayer de comprendre la position allemande. Pourquoi, sans aller chercher du coté de souvenirs d’il y a plus de 80 ans, les Allemands tiennent autant à ce que les pays d’Europe réduisent leur dette. Quelles sont leurs « bonnes raisons » d’être collectivement aussi intransigeants ? est-ce seulement, comme on le suggère volontiers ici ou là, égoïsme de riches qui ne veulent pas payer pour les autres et refusent tout effort de solidarité ? est-ce application de principes économiques désuets de ce qu’on appelle l’ordo-libéralisme, du nom d’un courant du libéralisme apparu en Allemagne dans les années trente ? Ou y a-t-il derrières ces positions qui sont, encore une fois, collectives, partagées par toute la classe politique allemande, de gauche comme de droite, des raisons qui méritent qu’on s’y attarde ?

Un endettement qui inquiète les Allemands
Le mieux pour commencer cette investigation est d’aller regarder du coté des chiffres, des statistiques et, d’abord, bien sûr, du coté de l’endettement. C’est assez facile puisque Google met à notre disposition des outils qui permettent de comparer facilement l’endettement de différents pays d’Europe. Et l’on s’aperçoit en les regardant de plusieurs choses. D’abord, et ce sera peut-être une surprise pour certains, l’Allemagne est, elle aussi, endettée, très endettée, elle l’était en 2011 à hauteur de 82% quand la France l’était à hauteur de 85%. Cette dette ramenée à la population faisait que chaque Allemand était endetté de près de 25 000€. Ensuite, quand on regarde de plus près les chiffres sur la toute dernière période, on voit une cassure. Alors que pendant des années les courbes de progression de l’endettement évoluaient de manière très proche en France et en Allemagne, ces courbes se sont inversées en 2010 : l’endettement français a continué de progresser de manière très rapide, il est passé en quelques mois de 85 à 91% du PIB aujourd’hui, tandis qu’il a, toujours en % du PIB reculé en Allemagne. Cela tient à la meilleure santé de l’économie allemande mais aussi à des politiques qui ont choisi de freiner une dérive.
Cette politique porte un nom : le Schuldenbremse, le frein à l’endettement voté en 2009 par les deux chambres, le Bundesrat et le Bundestag, à une majorité des deux tiers. L’opinion allemande est donc dans sa très grande majorité convaincue de la nécessité de freiner l’endettement. Mais pourquoi ?
La presse française quand elle aborde ces questions insiste sur la démographie allemande. Les Allemands seraient d’autant plus soucieux de réduire leur endettement qu’ils connaissent mieux que d’autres leur démographie. La réduction de la population ne peut évidemment qu’accroître la charge de la dette pour leurs descendants. Soit, mais les Allemands que l’on présente volontiers comme si égoïstes ne le seraient pas tant que cela lorsqu’il s’agit de leurs descendants. Egoïstes pour les Grecs mais pas pour leurs petits-enfants ? C’est possible, mais je ne suis pas certain que ce soit très convaincant. Lorsque l’on est égoïste, on l’est en général pour toujours.

Il y a, me semble-t-il, une autre explication. Les Allemands ont tout récemment dû financer la réunification des deux Allemagne. Ils ont dû payer pour les Allemands de l’Est. Et ils ont payé cher. Le jeu en valait sans doute la chandelle mais beaucoup d’Allemands de l’Ouest en gardent de mauvais souvenirs et, plus même que cela, une certaine amertume. Une amertume d’autant plus vive que leur système fédéral est basé sur la solidarité, sur le transfert de ressources des Etats, des länders les plus riches ou, si l’on préfère les plus vertueux, vers les plus pauvres, ou s’il l’on préfère, les plus dispendieux, les plus insouciants. L’Allemagne fonctionne sur le modèle de ce que l’on appelle de l’autre coté du Rhin une Transferunion, une fédération basée sur les transferts des länders riches vers ceux qui ont plus de difficultés. Et ce n’est pas un vain mot, lorsque l’on regarde les chiffres : la dette ramenée au citoyen est de 28 600€ par habitant dans le petit länder de Brême et de seulement 2 200€ dans la Saxe. Les Allemands sont donc particulièrement sensibles à ces écarts. Et s’ils ont accepté en 2009 si massivement le Schuldenbremse, c’est qu’ils ont voulu éviter que ces écarts ne se creusent jusqu’à devenir intenables.

Ce qui vaut pour l’Allemagne vaut pour l’Europe
Les Allemands ne sont pas les seuls à s’inquiéter de ces trop gros écarts entre régions au sein d’un même pays. On retrouve ce même phénomène un peu partout en Europe sauf, peut-être, pour des raisons historiques en France.

Si aujourd’hui les Catalans manifestent avec tant de vigueur pour leur indépendance c’est qu’ils ne veulent plus payer pour le reste de l’Espagne. J’ai pris l’exemple de l’Espagne mais j’aurai pu prendre celui de la Belgique. Le comportement des Allemands à l’égard des Grecs, des Portugais ou des Espagnols n’est pas différent de celui des Catalans à l’égard des Espagnols ou des Flamands à l’égard des Wallons.

Les Allemands ont tiré de leur expérience nationale une conclusion qu’ils appliquent à l’Europe : on ne peut pas construire une fédération dont tous les membres sont solidaires les uns des autres sans un minimum de discipline budgétaire. Dit autrement : on ne peut pas demander aux Allemands de payer pour aider les Grecs à se sortir de leurs difficultés si ceux-ci ne font pas de réels efforts pour respecter des règles communes. Or, cette discipline n’existait pas en Europe. Et toute leur politique n’a d’autre objectif que de l’introduire. S’ils le font avec brutalité c’est peut-être qu’ils sont maladroits, mais c’est aussi qu’ils savent que s’ils cèdent en cette période de crise ils n’auront plus aucune chance d’imposer cette discipline. Et que le développement de l’Europe en sera durablement fragilisé.

L’Europe est d’ores et déjà une fédération
On le voit, on est bien loin des discussions sur la bonne et la mauvaise dette à la mode, tout le monde est d’accord pour dire que ce n’est pas la même chose de s’endetter pour investir et de s’endetter pour payer les dépenses courantes. Mais il s’agit moins de cela que de la construction de l’Europe et de la vision qu’on en a.

Les Français même les plus européens restent attachés à l’idée d’un Etat nation qui décide librement de son sort ; pour les Allemands, l’Europe est déjà une fédération qui fonctionne sur un modèle qu’ils comprennent en s’appuyant de leur expérience d’une République fédérale. Et ils ont raison. L’Europe avec sa distribution des pouvoirs entre des institutions supranationales indépendantes (banque centrale, cour de justice européenne), des centres de pouvoir européens, commission, parlement européen, des Etats et des régions est bien une fédération avec ses avantages et ses contraintes.

L’avantage principal de cette structure institutionnelle est la liberté accrue qu’elle nous donne : chacun peut aller s’installer où il veut en Europe pour travailler, payer ses impôts, acheter une résidence secondaire… Mais cette liberté a un prix : la mise en concurrence des différents Etats et régions.
Plusieurs économistes se sont intéressés à ces questions et ont analysé l’impact de ce type d’organisation. Le premier à l’avoir fait de manière systématique est Charles Tiebout dans un article publié en 1956. Article dans lequel il fait la théorie du vote avec ses pieds. Et dans lequel on trouve cette phrase : 
Spatial mobility provides the local public-goods counterpart to the private market’s shoping trip.

Tiebout remarque que les dépenses des collectivités locales sont plus importantes que celles de l’Etat central mais aussi qu’elles sont décidées par les résidents locaux à l’occasion d’élections. Certains souhaitent dépenser plus pour l’accueil des jeunes avec des écoles, des équipements sportifs, des logements adaptés aux étudiants, d’autres plus pour, par exemple, le confort des personnes âgées. Les parents d’enfants et d’adolescents iront, explique-t-il, plutôt s’installer dans les municipalités qui ont investi dans les services pour les jeunes, les personnes âgées s’installeront plutôt dans celles qui ont multiplié les services pour les seniors. Je simplifie naturellement beaucoup puisque cet article est en réalité une réponse technique à un problème soulevé par un autre économiste, Paul Samuelson, mais il décrit bien une certaine réalité. Des villes comme Rennes ou Rouen ont tout fait pour accueillir correctement les étudiants, d’autres, comme Cannes ou Nice, ont plutôt mis l’accent sur des services, comme la sécurité, qui attirent les retraités.

Il y a dans le modèle de Tiebout une autre idée qui éclaire l’émiettement actuel des Etats nations qu’il s’agisse de l’Espagne, de l’Italie ou de la Grande-Bretagne : plus, dit-il, il y a de municipalités entre lesquelles choisir, plus le citoyen a de chance d’en trouver une qui correspond à ses attentes. Or, c’est bien ce vers quoi nous nous dirigeons aujourd’hui avec cet émiettement des Etats que l’on observe partout en Europe et qui donne aux dirigeants de ces entités plus petites la possibilité de se démarquer de leurs voisines.  

Plus près de nous, Barry Weissman et quelques autres économistes se sont interrogés sur le rôle de la décentralisation dans les succès économiques de la Chine. Aussi étrange que cela puisse paraître ils expliquent ceux-ci par la structure fédérale de la Chine qui donne aux entrepreneurs chinois la possibilité de mettre en concurrence les différentes régions et de choisir celles qui leur offrent l’environnement le plus favorable d’abord et surtout en matière de respect des droits de propriété. La structure fédérale aurait, à les entendre, rendu beaucoup plus difficiles les comportements de prédation des autorités politiques. Tout simplement parce que le responsable local qui aurait voulu, par exemple, s’approprier les richesses des entreprises risquait de voir celles émigrer vers les régions plus clémentes.
Il s’agit là encore, on l’a compris, d’un modèle théorique. Dans la pratique les autorités chinoises se montrent un peu partout corrompues, mais ces analyses ont le mérite de souligner que la structure fédérale, parce qu’elle met en concurrence des entités, régions, états… entre lesquels les individus peuvent librement circuler, impose une certaine discipline aux dirigeants politiques : ils ne peuvent pas faire n’importe quoi. Il leur faut respecter un certain nombre de règles qui protègent les citoyens contre les excès du pouvoir au risque de les voir tout simplement déménager.

Imaginons, pour ne prendre qu’un exemple, qu’une région à l’intérieur d’un Etat fédéral se mette à torturer ses citoyens, les plus menacés auraient vite fait d’aller s’installer pour travailler et vivre dans une région voisine. Ils y seraient accueilli sans le moindre problème. Dans un Etat nation traditionnel, avec des frontières difficiles à traverser ce serait plus difficile : l’Espagnol qui s’installait du temps de Franco en France pour échapper à la dictature était un réfugié politique, celui qui s’installe aujourd’hui en France pour travailler est un européen mobile, un « europatrié ».

Ce que les politiques perdent d’un coté, les citoyens le gagnent de l’autre.

L’Europe est-elle démocratique ?
Tout ceci pourrait n’être que théorie, mais c’est bien ce qui se passe en réalité. Si nos rues sont pleines aujourd’hui de roms, c’est qu’ils sont victimes d’ostracisme et de racisme dans leur pays d’origine, notamment de la Roumanie. Et comme ils bénéficient, du fait de leur citoyenneté européenne, de la liberté de circuler, ils peuvent venir s’installer ailleurs. Leur vie chez nous est extrêmement difficile mais ils échappent aux expéditions punitives de gangs racistes qui les attaquent régulièrement chez eux. Aujourd’hui les roms qui s’installent chez nous ne peuvent pas, du fait de règlements absurdes, travailler, ce qui rend leur situation particulièrement difficile, mais il est probable que s’ils pouvaient le faire, on en verrait moins dans les rues. On observera, d’ailleurs, que l’une des conséquences de l’appartenance de la Roumanie à l’Europe est que régulièrement les autorités européennes et les dirigeants des autres membres de l’Union rappellent ses gouvernements au respect des valeurs communes. Il y a quelques semaines Laurent Fabius et Manuel Valls sont allés à Bucarest pour cela, et pour rien d’autre. Ils y ont été mal reçus mais le gouvernement roumain n’a pas contesté leur légitimité à le faire, ce qui aurait été le cas s’ils n’avaient été membres de l’UE.

Des analyses de ce type invitent à revoir avec prudence toutes les déclarations sur le manque de démocratie de l’Europe. L’Europe telle qu’elle fonctionne n’est certainement pas démocratique au sens traditionnel, mais elle nous propose un modèle dans lequel les citoyens sont mieux protégés des exactions des dirigeants qu’ils ne seraient dans un Etat fermé.

J’ai pris là des exemples sur les libertés publiques, mais les économistes que je citais tout à l’heure insistent plutôt sur les libertés économiques ; et c’est là qu’ils rejoignent les critiques de l’Europe à la Mélenchon et qu’ils apportent de l’eau au moulin des anti-européens à la mode PC. Parce qu’elles mettent en concurrence différents Etats tout en assurant une parfaite mobilité des citoyens, les fédérations protègent les droits de propriété et évitent les réglementations qui font trop de tort aux investisseurs et aux entreprises : l’Etat qui voudrait mener des politiques trop hostiles aux entreprises verraient rapidement ses forces vives aller s’installer dans les Etats voisins plus cléments. En ce sens, la fédération est, de par sa structure même, plutôt propice à des politiques de type libéral. Ce n’est pas parce que les conservateurs sont au pouvoir en Allemagne et dans d’autres pays que l’Europe serait libérale, mais bien parce qu’elle fonctionne sur un mode fédéral qui freine les politiques trop dirigistes.
Cette thèse gagnerait naturellement à être nuancée, mais comment ne pas en voir une illustration dans ce qui se passe aujourd’hui avec l’évasion fiscale : les Etats qui ont, comme la France, des politiques fiscales trop sévères pour les plus riches voient ceux-ci s’installer dans les Etats voisins. Cela ne leur coûte rien puisque chacun peut s’installer où il souhaite au sein de la communauté européenne. Et c’est sans doute un frein que risque de rencontrer François Hollande dans sa politique fiscale, sauf à penser qu’il réussisse à convaincre nos voisins de mener des politiques fiscales comparables.

Les bonnes raisons allemandes pourraient aussi être les nôtres
Les Allemands ont donc de bonnes raisons de se comporter comme ils font. Des raisons que nous gagnerions à comprendre ne serait-ce que pour leur donner des gages qui nous permettraient d’alléger la contrainte budgétaire qui conduit à l’austérité. Des raisons que le principe de réalité devrait nous inciter à faire nôtres dés lors que nous sommes entrés depuis de nombreuses années, depuis que nous avons un marché commun, une monnaie commune, une banque européenne et un espace sans frontières, dans ce qui est en réalité une fédération. Plutôt que de nous voiler la face, comme nous faisons trop souvent sur cette réalité, nous devrions tout faire pour que cette fédération inscrive nos valeurs, nos mécanismes de protection sociale au nombre des règles qui s’imposent à tous.http://www.dissonancesx90x.net//Federalisme.mp3